De cirque en zoo, le calvaire de Baby se poursuit de l’autre côté de la Méditerranée

De cirque en zoo, le calvaire de Baby se poursuit de l’autre côté de la Méditerranée

Cirques
03.08.2023
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One Voice a enquêté au zoo du Belvédère, où Baby a été abandonnée par son dresseur et les autorités françaises.

En juin 2023, nous sommes retournés voir Baby, cette fois en Tunisie. Seule dans un enclos sans point d’eau ni zone de repos, elle tient difficilement sur ses pattes qui lui causent une douleur aiguë. En France, le ministère de la Transition écologique condamne les animaux détenus par les cirques, pour s’en débarrasser vite fait.

Après avoir documenté l’arrivée de Baby au zoo de Tunis il y a quelques semaines, nous nous y sommes rendus pour poursuivre notre enquête sur son exploitation, ininterrompue depuis plus de trente ans.

Au milieu de l’enclos, le bassin bétonné est désespérément vide. Rien n’est prévu pour la protéger du soleil de plomb, ni pour soulager ses pattes handicapées. Et elle risque à tout moment de tomber dans la piscine vide et de s’y blesser plus encore. Cette nouvelle geôle ne dispose pas même d’un seul enrichissement qui pourrait lui permettre de rompre l’ennui. Alors, pour soulager la douleur insupportable de ses pattes, Baby s’appuie contre un mur, dos au public, sans jamais pouvoir s’en soustraire. C’est désormais sur deux de ses membres qu’elle peine à s’appuyer. Sa souffrance est criante.

Dans un vacarme assourdissant de musique et de cris, et alors que les visiteurs lui jettent de la nourriture immangeable, Baby semble condamnée à s’enfermer dans des mouvements répétitifs. Toujours isolée, elle a vite été oubliée par Gilbert Bauer. Le dresseur, qui ne cessait de clamer son amour pour elle, ne peut plus en tirer profit.

Un mouroir dangereux pour les animaux comme pour le public

L’eau dont disposent les singes, comme celle de la plupart des animaux, consiste en une petite flaque sale. Même les canards n’ont pas de réel bassin. L’ours à bout de forces filmé en février semble avoir disparu… remplacé par deux autres qui tuent le temps en observant les visiteurs leur jeter de la nourriture par-dessus une eau verdâtre.

Pire : des enfants sont entrés dans l’enclos de l’hippopotame pour le provoquer en faisant des gestes brusques et en lui lançant des branchages depuis le bord de son bassin. Personne n’intervient pour éloigner les jeunes intrus de cet animal qui appartient à une espèce territoriale très dangereuse.

Un peu plus loin, un panneau « Interdit de caillasser les crocodiles » rappelle que l’un d’eux a été lapidé à mort.

L’État continue à protéger les cirques au détriment des animaux

Baby n’aurait jamais dû être envoyée dans ce mouroir. Après les deux condamnations obtenues contre son dresseur à la suite de notre enquête au Parc Saint Léger en 2019 puis en récidive en 2022, la justice aurait pu nous la confier. Nous avions en effet proposé de la prendre en charge et de la placer dans un sanctuaire où elle aurait enfin bénéficié de soins et de tranquillité.

Alors que le gouvernement mettait en avant sa « lutte contre la maltraitance animale » en vantant la fin de la présence des animaux sauvages dans les cirques, il a préféré vider les établissements itinérants de leurs animaux au plus vite quel que soit leur sort, qu’importe les solutions que nous avions offertes. Après avoir laissé filer Dumba en Allemagne, où celle-ci est décédée moins d’un an plus tard, Kamala au Royaume-Uni après le décès de sa compagne Mina, ou Nelly et Brigit ainsi que Rosa et Bambi dans un cirque en Hongrie, c’est sans surprise que le ministère de l’Écologie a tout fait pour se débarrasser de Baby, éléphante jetée aux ordures. L’État pense sans doute qu’on va applaudir à ses manœuvres abjectes. Ainsi qu’à l’arrêté ministériel publié le 13 juillet dernier qui permet désormais aux cirques d’obtenir des certificats de capacité équivalents à ceux des zoos.

Nous n’attendons plus rien du ministère qui a livré des animaux d’espèces protégées aux pires conditions qui soient. Mais pour Baby et tous les autres, nous restons pleinement mobilisés. Jusqu’à leur dernier souffle.

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