Les tours de passe-passe du Nouveau Cirque Triomphe en partie condamnés par la justice
Dans ces affaires à ramifications familiales labyrinthiques, les circassiens auront déployé l’intégralité de leurs talents de bonimenteurs. Et si les magouilles des Gougeon leur ont permis de retomber cent fois sur leurs pieds, cette fois, ils ont échoué – en partie – à passer à travers les mailles du filet de la justice, grâce à une enquête de One Voice de plusieurs années. Celle-ci nous a menés dans tous les cirques de cette famille, partout en France, et jusque dans l’échoppe d’un taxidermiste qui fait de l’import-export de produits issus d’animaux sauvages, l’un des plus gros trafics de la planète.
Photo : Tarzan, Alexandre Blanchon/Tonga Terre d’Accueil
Les tribunaux correctionnels (TC) de Bourgoin-Jallieu et de Bobigny ont (enfin) traité les dossiers que nous leur avions soumis en 2021… Nous réclamions une sanction exemplaire pour le trafic mené par les Gougeon, notamment au Nouveau Cirque Triomphe, mais aussi au Cirque de Paris (où nous avons obtenu la saisie de Jon, Patty, Marli, Céleste et Hannah), Cirque Idéal et Italiano, où la famille de dresseurs sévit aussi.
Nous avions clairement établi que les animaux étaient détenus illégalement par les divers membres de la famille. Ici, c’est chez Joseph et Stéphane Gougeon, mais aussi chez Guy Mordon, un oncle, mis en cause dans l’affaire (de nombreuses fois repoussée puis traitée à Bourgoin-Jallieu), que de la reproduction avait cours, et qu’un lion finissait dans la boutique d’un vendeur d’animaux « naturalisés » du tout-Paris, un commerce très lucratif.
Nos avocats avaient rassemblé et exposé sur un plateau nos preuves obtenues à l’occasion d’une enquête ayant démarré en 2018. Pourtant, la justice en a décidé autrement. Elle n’a pas tenu compte de l’essentiel. Une occasion manquée.
Tarzan, le lion placé qui cache les autres
Plusieurs lions étaient détenus sans certificat de capacité et ont été soi-disant placés dans le cirque de Mordon sans que celui-ci ait non plus ces autorisations ; l’identification de Jon, le lion squelettique et mutilé, déjà saisi et placé par nos soins dans un refuge des mois auparavant, était attribuée à Tarzan dans le recueil de suivi des animaux du Nouveau Cirque Triomphe… Sous la pression de notre travail sans relâche, Tarzan
avait été placé au même endroit que Jon, chez Tonga Terre d’Accueil.
De tout cela, le tribunal de Bourgoin-Jallieu n’a retenu dans sa décision du 20 février 2023 que le fait que Tarzan était détenu illégalement. Seul Stéphane Gougeon est condamné pour détention non autorisée d’animal d’espèce non domestique, à quatre mois de prison avec sursis et des dommages à verser. Les faits n’ont pas été retenus contre Joseph Gougeon. Quant à Guy Mordon, il a été relaxé.
L’affaire dans l’affaire : à vingt mille euros la peau de lion… seulement une tape sur les doigts
Enfin, nous avions retrouvé le taxidermiste non agréé qui travaillait pour le compte du revendeur chez qui Joseph Gougeon avait déposé une dépouille de lion en 2019, avions mené l’enquête et déposé plainte. Le prévenu a été entendu lundi 20 février par la justice. Il avait reconnu sa culpabilité (audience en CRPC). Mais le tribunal de Bobigny a décidé de classer l’affaire sans même entendre nos arguments.
Ces décisions, nous les respectons tout en les déplorant. Signe des temps : l’état de droit, exsangue, doit procéder à des choix, faits au détriment des voix que nous portons. Cependant, rien ne nous arrêtera pour que nos concitoyens, quelle que soit leur place dans la société, sachent ce qu’endurent les animaux dans notre pays. Nous n’en avons pas fini avec notre combat pour les défendre contre l’exploitation, le dressage et la captivité dans les cirques.