Chasse en Sologne : quand la mort des oiseaux est une bonne affaire
Fusil et alcool forment toujours un cocktail gagnant pour les chasseurs. Les oiseaux n’ont aucune chance. Les propriétaires de domaine, eux, encaissent les euros.
En novembre dernier, nos enquêteurs ont infiltré un groupe de chasseurs de Sologne. À leurs risques et périls, ils ont filmé les coups de feu, les oiseaux affolés qui tombent par dizaines, puis qui agonisent sous les sarcasmes. Des scènes d’horreur, monnayées à coups de billets. La chasse est un marché juteux. La mise à mort des oiseaux rapporte gros.
«Les oiseaux essaient de fuir, de voler vite et haut, mais ils sont encerclés. Leur seule chance de survie, c’est la médiocrité des tueurs et leurs erreurs de tir. Certains tombent de plusieurs dizaines de mètres en plein vol, encore vivants. Le choc est violent, leur corps percute le sol, ils se débattent, pattes cassées, poumons perforés. L’agonie est longue…»
raconte un de nos enquêteurs, encore très ébranlé par les scènes dont il vient d’être témoin.
En novembre dernier, nous avons ainsi infiltré une traque en Sologne. Si nos images – tournées pour la plupart discrètement– révèlent la barbarie de ces pratiques que certains osent encore défendre au nom de la tradition, elles mettent aussi au jour ce que l’on sait moins : le trafic juteux de la chasse.
Des cartons de fête foraine sur des êtres sensibles
Nos vidéos le prouvent : la chasse n’est pas une balade de santé en plein air, une harmonie de l’humain avec la nature et le vivant. Arrêtons avec ces images galvaudées. Pour remplir leurs besaces, les chasseurs paient les propriétaires des domaines. Ils négocient la date de la tuerie, le nombre d’oiseaux qu’ils pourront tirer. La mort est un marché, une affaire rentable.
Ce jour-là, faisans et perdreaux sont lâchés dans un ciel plombé. Ils sont au rendez-vous. Les chasseurs ont payé. Affolés, les oiseaux tentent de s’enfuir. Hélas, pris dans l’œil de mire des hommes armés, ils ne sont que de vulgaires cartons de fête foraine, qui s’écroulent sur le sol. À terre, les hommes les ramassent et les alignent.
Certains bougent encore, tressautent, agonisent.
«J’ai vu ce magnifique faisan vénéré se débattre, puiser désespérément dans ses dernières réserves de vie pour apaiser la douleur qui le transperce. Impassibles, les chasseurs l’observent. Finalement, l’un d’eux l’attrape par la queue, les pattes, le secoue et le repose parmi les cadavres. Mais l’oiseau s’agite toujours. « Fais le mort », ordonne un autre. De longues minutes s’écoulent encore avant que ses ailes s’immobilisent. Définitivement. Voilà à quoi ressemble l’agonie d’un faisan frappé en plein vol .»témoigne encore notre enquêteur.
Des carnages chaque année
Le soir, après la battue, les hommes comptent leurs prises. 124 faisans, perdreaux et pics verts sont tombés sous les balles. Les hommes applaudissent. Ils ont bien mérité l’apéro.
Chaque année, des millions d’oiseaux tombent ainsi, abattus en pleine migration ou après des mois d’élevage en captivité. Nos enquêteurs infiltrent les traques depuis trois ans. Ils peuvent témoigner des « cadeaux » dont les autorités abreuvent les chasseurs en permanence. En cette période électorale, les lobbies cynégétiques vont faire pression sur les élus plus que jamais. Nous ne les laisserons pas faire.