Le personnel d’une fourrière se fait la main sur les chats errants... Une enquête de One Voice
À la fourrière-refuge du Sud Manche géré par Passerelles vers l’emploi à Avranches, les chats sans famille sont gérés par des personnes manquant de formation dans des locaux insalubres. One Voice réclame en urgence un plan national pour les chats errants.
Voici le deuxième volet de notre campagne dans les fourrières en France, qui met en lumière la manière dont notre pays traite les chats. Cette investigation près d’Avranches en Normandie permet de montrer avec un cas concret les conséquences très réelles de l’irresponsabilité des particuliers et des pouvoirs publics vis-à-vis des chats. C’est-à-dire la souffrance, les maladies et in fine l’abattage – qui osera encore parler d’euthanasie ici ?! – dans les fourrières, de ceux qui ne sont pas morts dans la rue. One Voice organise une action de sensibilisation partout en France, et réclame un plan d’urgence contre l’errance féline.
Passerelles vers l’emploi, une fourrière-chantier d’insertion, faite de bric et de broc
Faut-il que des animaux déjà sans abri aient à subir le manque d’hygiène, l’inconfort, et la fragilité psychologique et sociale des humains qui s’occupent d’eux une fois secourus ?
Quand nous avons reçu le premier signalement sur cette fourrière-refuge, la Fondation Bardot et d’anciennes bénévoles avaient déjà interpellé la préfecture plusieurs fois depuis 2015, sans grand succès. Comme pour le SIVU 47, premier volet de notre campagne dans les fourrières, la directrice d’un refuge voisin avait, elle aussi, tenté à de maintes reprises de faire que la situation s’améliore. Y compris avec le soutien de la Confédération nationale de défense de l’animal, en signalant les problèmes d’hygiène, les non-respects de la réglementation et le manque de formation du personnel aux conséquences désastreuses pour les animaux.
Passerelles vers l’emploi propose aussi des ateliers visant à la réinsertion via d’autres activités telles que la plantation de légumes et végétaux, mais aussi par des travaux. Cette mission sociale est exemplaire… tant que des êtres sentients eux aussi dans la détresse n’entrent pas en jeu.
Notre enquête révèle que la plupart des chats recueillis y sont tués !
Quand nos enquêteurs ont enfin pu se rendre sur place, les confinements et restrictions de transport interdépartementaux ayant empêché notre réactivité habituelle, il y avait eu quelques améliorations dans les infrastructures. Dans l’espace extérieur de la chatterie, par exemple, une dalle de béton avait été coulée, en lieu et place de la terre battue préexistante. Mais il était toujours impossible de la nettoyer correctement.
Hygiène, éclairage, aléas climatiques, maladies et blessures, fuites, les problèmes essentiels persistaient. Pendant des mois, aucun chat n’a été proposé à l’adoption car rien n’était prévu pour les soigner. Après une quarantaine passée entassés dans un cabanon sans lumière du jour, sans isolation et sans visite vétérinaire, ils étaient placés dans la chatterie commune. Avant cela, pas non plus de tests FIV et FeLV préalables. Une absence totale de soins pour ces chats atteints pour la plupart de coryza et de problèmes intestinaux…
Les chatons et les chats malades y sont-ils une fois de plus exposés au froid en ce moment ? C’est le problème avec le manque d’argent public et les solutions bancales : on doit choisir entre deux solutions inadaptées et ce sont les chats qui trinquent.
2020 fut une année terrible pour les chats de la fourrière-refuge du Sud Manche. Il s’y est déroulé une véritable hécatombe. L’équarrisseur qui passe quand la fourrière a rempli de corps son congélateur de 200kg, c’est-à-dire en temps normal tous les six mois à un an environ, est passé trois fois plus souvent. Et pour cause ! Des centaines de chats sont morts dans l’année, la plupart sans justification.
Sont-ils morts de maladie ? Si oui, laquelle ? Ont-ils été « euthanasiés » ? Si oui par qui et pour quelle raison ? Un jour, dix décès dont neuf « euthanasies » ont eu lieu. Les chatons étaient abattus sans justification non plus, et parfois sans la présence d’un vétérinaire. Par qui ? Comment ? Les chats et les quelques chiens trouvés dans le congélateur n’étaient d’ailleurs pas tous passés par le cabinet du vétérinaire. Leur profil ouvert à l’adoption était effacé de la page Facebook. On se demande d’ailleurs comment certains chatons avaient été tués car du sang congelé était visible dans leur gueule. La DDPP (les services vétérinaires) a épinglé cette gestion désastreuse du refuge-fourrière et exigé de nouvelles procédures.
Les chiens, eux, pendant la même période, avaient pour la plupart été rendus à leur famille, ou adoptés. On voit bien que le traitement du refuge-fourrière vis-à-vis d’eux n’est pas du tout le même… Mais également le traitement que certains particuliers font subir aux chats en négligeant leur identification et leur stérilisation !
Résoudre le problème en s’attaquant à sa racine
Nous demandons depuis toujours et plus encore depuis 2018 un plan d’urgence pour les chats errants en France. La loi de novembre 2021 s’est illustrée par ses lacunes, l’une d’entre elles et non des moindres est de ne pas avoir imposé la stérilisation pour les chats non LOOF partout sur le territoire, avec un quadrillage clair des communes et un engagement réel de l’État et des services publics.
Le programme Chatipi que nous développons ne peut à lui seul remplir la mission de pédagogie autour des chats errants et résoudre le problème national auquel ils sont confrontés. Il y a actuellement quinze millions de chats dans les foyers français, le double du nombre de chiens. Et ils sont quasiment autant à devoir s’en sortir seuls dans nos rues, subir la rudesse des éléments, la faim, la soif, et parfois la violence des humains. Car dans notre pays, pas moins de onze millions de chats errent dans les villes, villages et campagnes. Ce chiffre, donné il y a quelques années, est sans doute très sous-estimé aujourd’hui.
Dans les fourrières, si un chat n’est pas identifié, il sera abattu après les huit jours réglementaires s’il n’est pas réclamé ou transféré dans un refuge… si celui-ci n’est pas surchargé comme c’est malheureusement le cas partout.
Les particuliers doivent mesurer leurs responsabilités. Vivre avec un ou plusieurs chats n’est pas anodin. Ils ont besoin de nous, leur prétendue indépendance cache une grande vulnérabilité. Ils ne peuvent pas survivre dans la rue. Aucune portée ne doit y naître, loin des yeux et de la protection des humains. Chaque chaton doit être identifié et stérilisé avant ses six mois, et les services publics ont un devoir d’investir massivement dans la stérilisation des chats errants. Dans chaque commune. Les fourrières et les refuges sont structurellement en manque de moyen, l’État doit intervenir.
Le week-end des 10 et 11 décembre, nos militants seront dans la rue partout en France (à Aix-en-Provence, Amiens, Gap, Golfe Juan, La Rochelle, Lille, Lyon, Nice, Paris, Tours, Troyes, et le 14 à Bordeaux), pour sensibiliser à l’errance féline et aux solutions possibles et efficaces : la stérilisation systématique des chats non LOOF et la lutte contre les achats compulsifs sur internet, notamment à l’approche des Fêtes.
Vous pouvez signer nos pétitions pour un plan d’urgence pour les chats errants, mais aussi pour une meilleure protection des chats et des chiens, nos compagnons.