Une journée dans la peau d'un singe de laboratoire
Ce récit proposé par One Voice, c’est un aperçu du quotidien des 3500 primates que les laboratoires exploitent chaque année en France. Parmi eux, près de 2800 sont mis à mort. Ces bribes de vécu sont issues de plusieurs « fiches individuelles » de primates. Ceux-là sont décédés (causes de la mort non communiquées) ou, nettement moins nombreux, revendus à d’autres laboratoires pour subir souffrances et peurs, encore. Ces extraits, issus de documents (pourtant) publics, One Voice ne les obtient que rarement et très souvent en se battant jusqu’en justice.
«Ils », ce sont les laboratoires, qui ne veulent pas que l’on sache ce qui se passe réellement derrière leurs murs. En attendant l’ensemble des documents que le CNRS et l’Université d’Aix-Marseille ont été condamnés à nous transmettre fin novembre, nous avons assemblé, à partir des premiers documents partiels reçus et d’anciens documents et photographies d’autres lieux, des extraits de ce que subissent ces êtres vivants sensibles.
C’est cette réalité cruelle et douloureuse que les laboratoires tentent de cacher derrière des critères de« bien-être ».
8h00
Je me réveille avec le bruit des clés et des portes métalliques.
Les néons s’allument d’un coup, sans prévenir.
Je me recroqueville au fond de ma cage froide.
Depuis que je suis arrivé dans ce nouveau laboratoire,
Je ne sais jamais ce qui va se passer.
9h00
J’entends les autres singes s’affoler.
Des cris. Des coups contre les cages.
Certains mordent les barreaux, leurs dents saignent parfois.
Certains se battent entre eux, de peur, comme moi.
Mon cœur bat trop vite.
Je n’arrive pas à me calmer.
Ils me donnent à manger, le goût est différent en ce moment.
Ils disent que le « protocole cocaïne » commence.
Je sens des choses différentes dans mon corps depuis.
Je n’ai pas le choix, c'est la seule nourriture disponible.
10h00
Ils ouvrent la cage de mon voisin.
Ils le prennent par le cou avec leur tige métallique.
Lui crie, s’accroche.
Ils le sortent de force.
Un autre compagnon s’est fait arracher une griffe comme ça.
Et il n'est pas retourné dans sa cage hier.
Je vois et j’entends tout.
Je crie maintenant. Je suis le suivant.
Un peu plus tard
Je perds souvent la notion du temps
À cause de toutes ces choses qu’on m’injecte.
Ils m'installent de force dans un système qui me bloque.
Immobile, impuissant, contraint. Effrayé.
La compote donnée « en récompense » n’a jamais suffit.
Chaque fois c’est toujours aussi douloureux.
Ils me branchent des fils sur le corps.
Ils m’ont opéré pour installer du matériel dans ma poitrine.
Je subis des chocs électriques en ce moment,
Chaque jour plus intenses.
Aujourd’hui les chocs étaient très forts.
Ma main et mon pied tremblent sans que je le décide.
Ils me font davantage de piqûres depuis plusieurs jours.
Ils disent que mon dispositif s’est infecté.
Je reste immobile. Je n’ai pas le choix. J’ai mal.
Retour dans la cage
La porte se referme.
Le silence revient, mais pas le calme.
Je suis mal, je vomis beaucoup.
J’ai peur.
Tout le temps.
Ils notent des choses sur leurs feuilles.
Moi, j'endure chaque minute, chaque heure.
Au début j’espérais. La liberté, tout le temps.
Maintenant j’attends la fin, encore.
Je m’appelle Eliot, ne m’oubliez pas.
Le récit d’Eliot, c’est également celui d’environ 3500 primates qu’ils exploitent chaque année en France. «Ils », ce sont les laboratoires. 90 % des expérimentations animales qu’ils réalisent ne sont pas imposées par la loi.
Pour Eliot et tous les autres, agissez à nos côtés :
- dites non à l’extension de l’élevage de primate du CNRS;
- dites stop à l’expérimentation sur les primates.