Quand le Zimbabwe brade sa faune sauvage
Le Zimbabwe met en vente les animaux de ses réserves afin d’éviter qu’ils ne meurent de faim et de soif. One Voice dénonce cette mise en coupe réglée d’êtres sensibles menacés au profit des zoos, des réserves de chasse mais surtout d’un régime peu démocratique.
Alors qu’une grave sécheresse frappe le pays et menace plus d’un quart de sa population de précarité alimentaire, nous avons appris que l’autorité des parcs du Zimbabwe (ZIMPARKS) invitait les acheteurs potentiels à présenter leur déclaration d’intérêt : lions, éléphants, rhinocéros. Ces derniers iront dans des zoos mais aussi dans des réserves de chasse privées. Zimparks gère une superficie totale de 47.000 km2, répartie entre dix parcs nationaux sur l’équivalent de 12,5 % du territoire du pays. Aucune information précise n’a encore été livrée sur les espèces en vente ou sur leur prix, mais le bruit court qu’un bébé éléphant pourrait valoir jusqu’à 60.000 dollars.
En 2012 déjà, quatre éléphanteaux terrifiés avaient été arrachés à leur harde au Zimbabwe puis transportés dans des zoos du centre et du nord-ouest de la Chine. Ils ont survécu au voyage mais l’un d’eux est mort peu après son arrivée. Les trois autres sont en très mauvaise santé.
En 2014, le Zimbabwe récidivait : 24 nouveaux éléphants étaient enlevés à leur famille. Expédiés en Chine, ils apprennent aujourd’hui à danser sous les coups de pique de leur dresseur, au son d’une musique assourdissante. Car en Chine, comme à Amnéville, les zoos sont aussi des cirques. De rares images nous les montrent efflanqués, couverts de poussière et de blessures saignantes, agités de stéréotypies. La savane de leur mère est loin… À l’époque, leur vente fut justifiée non par la sécheresse, mais par la nécessité de payer le salaire des éco-gardes et de diminuer une population de pachydermes envahissants qui menaçaient les récoltes.
On le voit, les prétextes varient au fil du temps. Le Zimbabwe est pourtant bien le seul pays de la région à évoquer de tels problèmes économiques. Et le premier aussi à accueillir à bras ouverts des chasseurs de trophées richissimes, comme le dentiste américain Walter Palmer qui décapita le lion Cecil l’été dernier. Les rentrées financières issues de ces massacres sont fabuleuses, mais elles ne tombent sans doute pas dans la bonne poche. C’est que Robert Mugabe gère son pays de manière désastreuse, s’enrichissant comme tant de potentats africains sur le dos d’une population assommée par la pauvreté. Ce héros de la guerre d’indépendance a confié les cultures de son pays aux mains de courtisans corrompus, incapables d’en prendre soin et le poussant à la ruine. Il l’écrase aujourd’hui sous le poids d’une dictature sénile, homophobe, raciste, sexiste et liberticide. C’est le vieux Mugabe qui déclarait fièrement en 2003 :
« Hitler avait un seul objectif : la justice pour son peuple, la souveraineté pour son peuple, la reconnaissance de l’indépendance de son peuple et ses droits sur ses ressources. Si cela c’est Hitler, laissez-moi être le décuple de Hitler ». Que peut-on sérieusement attendre d’un tel homme en matière de sauvegarde de la nature et des animaux ?
D’autres pays comme le Kenya, la Tanzanie, le Rwanda, tentent aujourd’hui de rentabiliser par un tourisme écologique responsable, l’or vert qu’ils tiennent entre leurs mains : ces milliers d’hectares de forêts vierges, peuplés d’une faune rare et menacée. Le Zimbabwe abrite plusieurs espèces d’animaux sauvages, dont les célèbres «
Big Five » que sont le lion, le léopard, l’éléphant, le rhinocéros et le buffle. Une population de plus de 80.000 éléphants et 750 rhinocéros noirs y habite.
Le comportement de Robert Mugabe a de quoi inquiéter. Il pourrait inspirer en effet d’autres despotes qui n’hésitent pas, déjà, à livrer les Monts Virunga aux prospecteurs de pétrole. Jamais le trafic d’espèces menacées ne s’est si bien porté, qui alimente les zoos, les cirques ou les collections privées de milliardaires dubaïotes.
One Voice estime que la France doit intervenir, comme d’autres nations qui soutiennent l’effort de développement de l’Afrique. Elle doit exiger de ses partenaires africains que la préservation la plus stricte de la faune locale soit mise au rang des priorités majeures de tout accord de coopération. Quant au Zimbabwe, il mérite une condamnation diplomatique internationale.