Pour Jumbo et tous les animaux «de cirque»: le scandaleux courrier, qui en dit long…

Pour Jumbo et tous les animaux «de cirque»: le scandaleux courrier, qui en dit long…

Cirques
20.11.2019
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Le fait est étrange, très étrange. Un vétérinaire, hier mandaté par l’administration afin de contrôler les conditions de détention de l’hippopotame, produit aujourd’hui des compléments à destination du procureur de la République et des juges, sans y avoir été invité et en des termes posant question. Une prise de position orientée, scandaleuse à plusieurs titres…

De l’incurie à la propagande

Prenant appui sur sa mission d’inspection*, Dr P. vient d’élaborer une longue lettre, chargée de réflexions hautement philosophiques, sur l’utilité de la captivité des animaux dans les cirques. Nous savions déjà son rapport lacunaire, car si celui-ci pointait divers manquements aux obligations légales et règles de sécurité, il omettait cependant nombre de points clés de contrôle. Mais voici que, soudain, le professionnel – théoriquement impartial – sort totalement de son rôle en apportant de l’eau au moulin de circassiens traduits en justice pour exploitation irrégulière d’animaux et qui, par la force, ont fait barrage à une saisie judiciaire de l’animal !

S’immisçant avec autorité dans le débat entre les exploitants de Jumbo et notre association qui souhaite le placer en refuge, ce vétérinaire — praticien et chirurgien des animaux de compagnie et de rente, de son état… donc cherchez le spécialiste des hippopotames… — s’interroge en effet sur l’intérêt de libérer un animal si longtemps détenu, sur ses chances de réinsertion ailleurs (y compris sur ses terres d’origine). Et conclut sans ambages qu’il est utile pour tous de ne … surtout rien changer ! … Oui, c’est bien connu, les victimes du syndrome de Stockholm ne méritent pas d’être secourues… Ce médecin des chiens et des chats s’aventure même à douter des compétences et motivations des ONG qui, comme la nôtre, traquent depuis 25 ans toute irrégularité à l’égard des individus sauvages captifs afin de leur offrir une vie meilleure.

Bonnes questions, mauvaises réponses

Il est décidément étrange, quand on sait Jumbo seul et trimballé dans son camion-cage depuis 30 ans, après avoir été arraché à sa famille, d’insinuer que la privation de ses geôliers provoquerait un vrai traumatisme pour lui !

Il est également étonnant de citer le droit à l’attachement, à l’empathie, d’un exploitant vis-à-vis de l’animal… Doit-on pleurer dans les chaumières pour les pauvres bourreaux si on leur retire leurs jouets ? Nos détracteurs nous accusent souvent d’anthropomorphisme. On voit bien là qu’il ne se situe pas de notre côté, mais de celui des cirques qui jouent en permanence sur la corde sensible pour excuser/perpétuer la tradition.

Il est tout aussi curieux de justifier les actuelles conditions de détention de Jumbo en les comparant aux aléas d’une existence en pleine nature.

Il est surtout intolérable de défendre les précaires ménageries de cirques en les présentant comme des structures aptes à éduquer les plus jeunes aux espèces non domestiques … Or, c’est bien ce que le vétérinaire écrit ! Lisez ceci : « […] à moins que les safaris ne fassent partie un jour des sorties scolaires, sur quoi reposera l’éducation de nos enfants vis-à-vis des animaux en général et du monde « sauvage » en particulier ? » Eh oui ! … Heureusement que les cirques sont là, pour séquestrer, dompter, avilir la faune, et sensibiliser ainsi nos chères têtes blondes au respect de la différence !

Avec de tels arguments, le Dr P. se pose en autorité scientifique mais aussi éthique, et discrédite totalement la manière dont sont effectués les contrôles comme le sien.
Inutile de redire que la plupart des animaux détenus par des cirques itinérants voient régulièrement leurs besoins physiologiques fondamentaux bafoués, au mépris de la loi. Et les hippopotames, pour qui l’immersion dans l’eau est cruciale, sont particulièrement maltraités ! Rappelons aussi que la détention de Jumbo est par nature illégale puisqu’il ne participe pas aux spectacles.

Intolérable collusion ?

Alors, envisager un autre avenir pour Jumbo, le confier à de bons soigneurs dans un environnement différent, plus adapté… Non seulement nous en rêvons et agissons pour que cela advienne, mais nous savons que c’est possible ! Pour avoir produit tant d’expertises dans des cas de détention similaires à celle de Jumbo – éléphants, lions ou tigres notamment —, pour avoir obtenu tant de libérations et suivi leurs effets (même lorsqu’elles intervenaient, hélas trop tard, comme dans le cas de l’ours Micha), nous savons que nos efforts ont un sens ! Aucun doute : le combat pour les êtres en détresse et pour des cirques sans animaux doit être poursuivi. Et ce avec d’autant plus d’acharnement si les règles du jeu sont biaisées…

Car enfin, si tous les experts mandatés par l’administration mettaient en avant de telles conceptions avalisant les bienfaits de la détention des animaux (bref, la voix des exploitants), qui défendrait ces opprimés, assurerait avec compétence et impartialité les contrôles censés garantir leur bien-être ?

One Voice ne baissera pas les bras : les animaux ne peuvent continuer d’être victimes d’un système les ravalant au rang de choses curieuses exhibées, de produits commerciaux devenus objets de plaisir, et maintenus pour ce faire dans des conditions sans rapport avec l’essence de leur nature. Mettre ici en avant le lien unissant le tortionnaire au captif brisé pour justifier tout un système est indécent.

 

* Mandaté le 25/02/2019 par la Direction Départementale de la Cohésion Sociale et de la Protection des Populations (DDCSPP) du Tarn.

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