La Réunion : la croisade contre les requins doit cesser
Le braconnage des requins constitue une attaque de plus contre les écosystèmes coralliens de La Réunion déjà fragiles. Nous engageons une double procédure en justice.
Financé et mandaté par l’État français, le Centre Sécurité Requin poursuit sa guérilla contre les requins-tigres et bouledogues dans le sanctuaire de la Réserve naturelle nationale marine de La Réunion. Engagés dans le « Collectif Requins », nous portons plainte contre l’arrêté préfectoral qui autorise les pêches. Nous assignons aussi le CSR au pénal contre ce braconnage. Les associations Longitude 181, Sea Shepherd, Vie Océane et Taille-Vent sont avec nous.
Edit au 5 octobre 2021:
La date de l’audience pour notre recours au tribunal administratif de La Réunion était fixée le 6 octobre 2021. Mais nous apprenons par voie de presse que la préfecture a préféré retirer son arrêté du 19 juillet 2021 autorisant la pêche aux requins pour la période 2021-2023, la veille de l’audience. Aurait-elle voulu éviter une déconvenue inéluctable devant les tribunaux?
C’est une très belle belle victoire de notre collectif, au service des requins!
Reste la plainte au pénal contre le Centre Sécurité Requin, pour laquelle nous attendons une date d’audience.
Créée en 2007, la Réserve naturelle nationale marine de La Réunion s’étend sur 45 kilomètres autour de l’île. Sa mission est claire comme l’eau du lagon réunionnais : elle a pour vocation de protéger l’écosystème corallien. Si la pêche y est autorisée – selon des protocoles très stricts – dans les zones les plus au large, elle y est formellement interdite dans l’espace dit de « sanctuaire ». Cette zone est essentielle pour le maintien et la restauration de la biodiversité. La synthèse du comité scientifique qui gère la Réserve est formelle :
«[…] L’augmentation de la biomasse en poisson après 7 ans est surtout visible dans les zones où toute activité est interdite (sanctuaires) ou réglementée (ZPR). En l’état actuel, ces zones sanctuaires semblent donc bien jouer leur rôle […] en permettant une restauration très progressive et attendue des peuplements de poissons, et en particulier des espèces ciblées par la pêche.»
Des pêches criminelles, menées par l’État
Pourtant, c’est bien cette cette zone qualifiée de « sanctuaire », qui reste aujourd’hui encore la cible du Centre Sécurité Requin, une organisation mandatée et financée par l’État lui-même. Les requins, trop souvent mal aimés, y sont pourtant protégés. Mais même là, ils sont traqués sans pitié. Cette année, les « prélèvements » se sont accélérés : les dernières données du CSR, datées du 20 juin 2021, font état de 48 requins-bouledogues et 221 requins-tigres capturés.
Une catastrophe environnementale
Le CSR cherche à justifier ses exactions : nous les dénonçons depuis le départ. En 2016, nous avions déjà saisi avec succès le tribunal administratif de Saint-Denis. L’ordonnance avait été confirmée par le Conseil d’État.
Face à ces attaques flagrantes contre la biodiversité dans une zone censée être protégée, les membres du conseil scientifique de la Réserve marine sonnent aussi l’alarme et alertent les pouvoirs publics. Car les captures des requins ne solutionnent en rien les attaques contre les surfeurs et ne sont que des opérations de communication menées par les pouvoirs publics — opérations aux conséquences, hélas désastreuses. Et si les requins n’étaient pas attirés par des poissons remis à l’eau par les pêcheurs, ils ne s’approcheraient pas si près des côtes. Pour ne rien arranger, lors de ces « prélèvements » dit « préventifs », de nombreuses autres espèces en font les frais : requins-marteaux, murènes… Eux non plus n’ont rien demandé.
Des méthodes opaques
Jusqu’en mai dernier, les scientifiques de la Réserve pouvaient encore s’appuyer sur des données publiées par l’Ifremer. Les pêches du CSR faisaient alors l’objet d’un suivi géolocalisé à chaque opération et étaient mises en ligne en libre accès sur le portail « Sextant Océan Indien » de l’Ifremer.
Or depuis le mois de mai dernier, ces cartes ont disparu des radars. Selon la presse, le CSR aurait demandé à l’Ifremer de les effacer. Drôle de pratique ! Comment un organisme d’État, censé œuvrer en toute transparence, peut-il se permettre une telle manipulation ?
Un braconnage « autorisé » par l’État
Les pêches menées par le CSR dans la Réserve naturelle nationale marine de La Réunion constituent bien de graves atteintes à la biodiversité. Pour les suspendre, nous avons à nouveau saisi le tribunal administratif de Saint-Denis. L’audience du référé suspension aura lieu le 6 octobre à 9h30 au tribunal administratif de La Réunion. Mais nous n’en restons pas là.
Braconner des requins en zone protégée est donc possible ?! Nous attaquons le CSR au pénal. Il encourt une peine de prison.