Il est temps de reconnaître le statut de personne et les droits des éléphants
Nonhuman Rights Project mène avec l’aide de One Voice le combat pour les droits des éléphants arrachées à la nature, devenus captifs dans un cirque itinérant.
La première action en justice du Nonhuman Rights Project pour les droits des éléphants concerne les histoires individuelles de Beulah, Karen et Minnie : depuis le jour où des humains les ont arrachées à la nature, jusqu’à celui où elles ont fini dans un cirque itinérant du Connecticut. Mais la procédure concerne aussi l’histoire, vieille de plusieurs siècles, de la détention des éléphants en captivité. En voici un résumé, et comment NhRP, avec l’aide de One Voice, qui mène ce combat en France, travaille à la changer.
Pendant plus de 200 ans, les Américains ont détenu en captivité des membres de l’une des espèces les plus complexes sur le plan cognitif et émotionnel : les éléphants.
En 1796, une éléphante nommée Old Bet a été importée depuis l’Inde aux Etats-Unis, où elle a été achetée par Hackaliah Bailey, fondateur de Barnum & Bailey Circus. Attraction principale, elle sera transportée à travers le pays jusqu’à sa mort, à 20 ans, probablement tuée par un amateur de cirque. Au moment de sa capture, elle avait deux ans. Elle aurait du passer ses journées à explorer les forêts tropicales de l’Inde en compagnie d’autres éléphants, en particulier sa mère, puis grandir et aider à repousser les menaces en assumant ses responsabilités pour le bien-être du troupeau.
Aujourd’hui, les histoires de vie de près de 300 éléphants captifs aux Etats-Unis, et près de 20 000 dans le monde, ne sont pas très différentes de celles d’Old Bet et des nombreux autres éléphants qui, face aux balles et aux ankus, n’ont pas eu d’autre choix que de suivre ses pas.
Les éléphants ne sont pas des choses
C’est parce que les éléphants, comme tous les animaux non-humains, ne sont pas des « choses » moins légales qu’ils ne l’étaient deux décennies après la signature de la Déclaration d’Indépendance. Comme les défenseurs des éléphants s’en sont eux-mêmes rendus compte, les intérêts propres des éléphants – leur liberté en premier lieu – ne sont pas pris en compte dans les tribunaux ou dans la législation, car actuellement, et contre toute raison, ils n’ont aucun droit légal. En vertu des lois existantes sur le bien-être des animaux, nous pouvons les acheter et les vendre, les priver d’un groupe social, les contraindre physiquement à nous divertir, les transporter dans ce pays pour servir nos intérêts, et les exposer dans des enceintes en béton et en acier qui ne ressemblent en rien à leurs habitats naturels.
L’intelligence et la sensibilité des éléphants
Grâce, notamment, à l’étude scientifique à long terme du comportement des éléphants et de leurs groupes sociaux, nous en savons beaucoup sur qui ils sont : conscients d’eux-mêmes, résolveurs de problèmes autonomes et utilisateurs d’outils. Ils ont une identité propre, se rappellent du passé et planifient l’avenir, montrent de l’empathie pour les autres êtres (pas seulement les autres éléphants), et pleurent leurs morts – entre autres qualités et capacités. Mais nos systèmes juridiques n’ont pas encore intégré le niveau de connaissances que nous avons d’eux.
Une action inédite pour les droits des éléphants
Le 13 novembre, le Nonhuman Rights Project a déposé la toute première requête pour un bref d’Habeas Corpus pour des éléphants captifs. Nos clients sont Beulah, Karen et Minnie, exploitées depuis des décennies dans les cirques et les foires itinérants et actuellement détenues en captivité par le Commerford Zoo du Connecticut.
Armés d’arguments juridiques et d’affidavits soigneusement élaborés par les éminents scientifiques spécialistes des éléphants, nous demandons aux tribunaux de droit commun du Connecticut de reconnaître la personnalité juridique non humaine de Beulah, Karen et Minnie et le droit fondamental à la liberté corporelle en tant qu’êtres conscients d’eux-mêmes et autonomes et, en tant que tels, d’ordonner leur libération immédiate dans un sanctuaire approprié. La Performing Animal Welfare Society (PAWS – Société pour le Bien-Etre des Animaux du Divertissement), respectée dans le monde entier, a déjà accepté de leur offrir une place dans un sanctuaire dès leur libération.
Nos déposants incluent :
- Lucy Bates (Chercheur honoraire, École de psychologie et neurosciences, Université de St Andrews)
- Richard Byrne (Professeur de recherche, École de psychologie et de neuroscience, Centre d’apprentissage social et d’évolution cognitive, Université de St Andrews)
- Ed Stewart (Président et cofondateur, Performing Animal Welfare Society)
- Karen McComb (Professeur de Comportement animal et de Cognition, Université du Sussex)
- Dr. Cynthia Moss, (Directrice de programme et fiduciaire, Amboseli Trust for Elephants)
- Joyce Poole (Co-fondatrice et codirectrice, Elephant Voices).
Ajoutée à la sélection des affidavits se trouve l’ethnographie vidéo appartenant aux experts sur les éléphants sauvages, afin de renforcer l’injustice qui prive nos clients de leur liberté corporelle.
Pour la reconnaissance des droits fondamentaux de tous les éléphants
Comme Old Bet, Beulah, Karen et Minnie ont passé la plus grande partie de leur vie à divertir les humains. Mais leurs histoires ne doivent pas finir comme la sienne. Comme étant potentiellement les premiers éléphants à avoir des droits fondamentaux légalement reconnus, ils pourraient même permettre à d’autres éléphants de suivre leurs traces – pas dans une tente de cirque ou un enclos de zoo, mais dans un sanctuaire où leurs capacités et leur droit de vivre de manière autonome seront respectés et encouragés.
One Voice collabore avec NonHuman Rights Project. Cette publication est une traduction de l’article de Lauren Choplin.