Grand Cirque de Rome, la maltraitance en spectacle
Au Grand Cirque de Rome, on aime bien se moquer des êtres qu’on juge «plus petits que soi». Alors on fait faire des pirouettes, de la bicyclette, de la voiturette, à des primates transformés en soubrettes. Et quand le spectacle est terminé, c’est au fond de leurs cages minuscules qu’on les «jette». Nous portons plainte contre le directeur de cet établissement qui ne sait faire rimer «risette» qu’avec «maltraite»!
Au centre de la piste, un homme, droit comme un I, arbore un costume à paillettes. À ses pieds, deux macaques, affublés de tenues ridicules, lui emboîtent le pas au bout d’une laisse. Dos courbé, ils se tiennent prêts à obéir aux ordres les plus fous. Voici le maître étincelant et ses esclaves pathétiques. Voici le grand singe affichant sa supériorité sur les autres primates. Le numéro peut commencer.
Domination, humiliation, applaudissements
Le dresseur obtient tout ce qu’il veut de ses pantins vivants. D’ailleurs, ceux-ci commencent le spectacle au volant d’une voiturette motorisée pour enfants. Un simple claquement de doigts du « chef », et ils enchaînent avec d’autres astreintes. Le premier macaque, vêtu d’une robe à froufrou, doit jouer au funambule et adopter la bipédie sur une poutre. Un bref instant, il semble se rebeller. Mais il ravale vite son exaspération. Pas le choix.
Alors le pauvre s’exécute et tente de trouver son équilibre, d’abord les bras libres, ensuite en soupesant des balanciers sur lesquels flottent des drapeaux tricolores ou équipés de petits seaux… C’est au tour du second singe. Salopette rouge et parapluie assorti, il est soumis à des exercices similaires. Avant d’être contraint de rouler sur le sol en trottinette, puis de pédaler sur un tricycle… Les spectateurs jubilent, les petits clowns tristes saluent.
Pour ce soir, est-ce la fin de leurs tourments ? Il semble que non. Un peu plus tard, lors de la représentation d’un jeune circassien de dix ans, deux macaques — a priori les mêmes — déboulent encore sous le chapiteau… C’est cette fois-ci les quatre membres attachés sur des poneys que les malheureux endurent d’ultimes frayeurs : vitesse, sauts et cabrioles, claquements de fouet…
Expertise alarmante
Ces scènes surréalistes semblent tout droit sorties d’un mauvais film. Pourtant, il s’agit de la triste réalité de ces singes enrôlés de force par le Grand Cirque de Rome. Nos enquêteurs ont suivi plusieurs représentations de l’établissement en octobre dernier et récolté des vidéos, plus consternantes les unes que les autres.
Nous avons soumis les images à la Dre Siân Waters, éminente spécialiste des primates captifs et sauvages. Son rapport alarmant conclut que le bien-être de ces animaux est gravement compromis sur les plans physique et psychologique.
L’experte souligne notamment que la marche bipède n’est pas un comportement naturel chez les macaques et que les obliger à effectuer des mouvements anormaux peut exercer une pression inutile sur leurs corps, entraînant déformations, boiteries et blessures. Elle recommande d’ailleurs l’examen rapide de l’un des primates par un vétérinaire. En outre, elle dénonce le port obligatoire de vêtements qui entrave les gestes tout en causant des démangeaisons et irritations.
Quant au numéro d’équitation, il l’inquiète particulièrement :
«S’habituer à une telle restriction de mouvement est impossible et ces singes n’ont aucun contrôle sur ce qui leur arrive, ce qui nuit gravement à leur bien-être psychologique. Leur sécurité physique est aussi grandement compromise dès lors qu’un poney trébuche et tombe : liés par les bras et les jambes, ils ne manqueraient pas d’être blessés.»
Enfin, la scientifique pointe la mise en danger du public lorsque les macaques s’approchent de lui en marchant sur le mur d’enceinte.
Dépôt de plainte
À la fin du spectacle, lorsque les lumières s’éteignent, c’est dans l’ombre et derrière des grillages que l’on retrouve les petits singes prostrés. Eux, ainsi que d’autres animaux, tous séquestrés dans des cages et enclos dénués d’enrichissements, où leurs besoins physiologiques sont bafoués. En visitant les lieux, nous avons constaté de nombreuses infractions du Grand Cirque de Rome avec la loi.
Tandis que son propriétaire se pavane dans certains médias en reprochant aux défenseurs des animaux leur « fanatisme », nous portons plainte contre lui en nous appuyant sur des faits, rien que des faits.