Delphinariums : l'industrie attaque les mesures de protection, One Voice s'insurge !
L’arrêté pris le 7 mai dernier par le ministère de l’Environnement, sous l’autorité de Ségolène Royal, est aujourd’hui attaqué devant le Conseil d’État par les delphinariums, représentés par Marineland Antibes (06), le Parc Astérix de Plailly (60) et Planète Sauvage de Port-Saint-Père (44). Ce recours en annulation est doublé d’une demande de suspension, jugée par le Conseil d’État ce lundi 31 juillet à 10h30 en référé, afin d’obtenir un sursis dans la mise en oeuvre des mesures améliorant les conditions de détention des cétacés captifs…
L’arrêté pris le 7 mai dernier par le ministère de l’Environnement, sous l’autorité de Ségolène Royal, est aujourd’hui attaqué devant le Conseil d’État par les delphinariums, représentés par Marineland Antibes (06), le Parc Astérix de Plailly (60) et Planète Sauvage de Port-Saint-Père (44). Ce recours en annulation est doublé d’une demande de suspension, jugée par le Conseil d’État ce lundi 31 juillet à 10h30 en référé, afin d’obtenir un sursis dans la mise en oeuvre des mesures améliorant les conditions de détention des cétacés captifs…
Des arguments fallacieux
Rappelons que l’arrêté en question interdit la détention de tout nouveau cétacé à partir du 7 novembre prochain et exige des aménagements des conditions d’exploitation au profit des animaux actuellement détenus. Les exploitants vont arguer que ces aménagements (notamment le gros-oeuvre de bassins agrandis, à réaliser sous 3 ans) sont trop importants s’ils ne peuvent être amortis que pour la durée de vie des seuls individus déjà captifs. Curieux argument pour qui prétend avoir le bien-être des cétacés au coeur de ses préoccupations : l’espérance de vie moyenne de 20 ans prêtée aux cétacés concernés est tout à fait compatible avec l’amortissement des travaux prescrits, notamment au regard du chiffre d’affaires généré par cette activité chaque année.
Pour One Voice et tous les experts scientifiques travaillant avec elle, les arguments aujourd’hui avancés par les delphinariums dans leurs actions en recours sont fallacieux. Soutenir que l’interdiction des reproductions programmées dans le cadre d’échanges est nuisible au bien-être des dauphins est discutable, plus encore de la part d’établissements où la logique commerciale prédomine.
De nombreux rapports scientifiques, notamment ceux remis par One Voice au Ministère, attestent que la captivité nuit par nature au bien-être des cétacés, faits pour le grand large et non des bassins de béton. Pour l’association, voir aujourd’hui les parcs marins s’ériger en défenseurs de la sexualité heureuse des captifs (pour peu qu’ils produisent de nouveaux détenus, sujets d’attractions), laisse vraiment songeur.
De nombreuses voix s’élèvent
Éminente biologiste marine, spécialiste mondialement reconnue, la Dre Naomi Rose explique : « Contrairement à ce qu’avance l’industrie, cette interdiction de la reproduction n’aura pas d’impact significatif sur le bien-être des dauphins – qui pourrait même s’améliorer. De nombreux centres pratiquent déjà une régulation des conceptions en séparant des individus mâles et femelles lors de leurs cycles hormonaux favorables, en vérifiant chaque matin les niveaux d’hormones dans les urines des dauphins femelles. Sans avoir à supporter physiquement une gestation et une mise au monde, et sans la menace psychologique de voir son nouveau-né mourir précocement dans un bassin de béton inadapté, ces dauphins pourraient même être effectivement moins stressés qu’ils ne le sont actuellement. Est-il besoin de rappeler que la captivité prive déjà les cétacés de nombreux comportements naturels, notamment leur faculté de nager en ligne droite sur des distances bien supérieures à quelques coups de queue, de plonger au-delà de quelques mètres de fond, de chasser pour se nourrir. Ce n’est pas par hasard si l’industrie parle de maltraitance sur les dauphins uniquement à propos de leur capacité à produire plus de dauphins captifs exploitables. »
Avocate des droits de l’animal, consultante pour One Voice,
Me Arielle Moreau renchérit : « Les delphinariums veulent continuer à jouir d’un droit de propriété absolu sur ces êtres et pouvoir les faire travailler à leur guise, les échanger, contrôler leur sexualité et leur maternité, disposer de leurs bébés et de leurs enfants à leur gré, sans aucun égard pour leurs désirs et leurs envies. Ils sont dans le déni de leurs besoins et de leur nature car pour eux, les orques et les dauphins leur appartiennent ils sont dépourvus d’existence propre et n’existent que pour servir les intérêts de leurs sociétés commerciales. Or les dauphins et les orques sont des individus autonomes, hautement intelligents et sensibles, ils ont le droit d’être protégés et reconnus en tant que personne. »
D’autres voix s’ajoutent au concert des oppositions face aux recours déployés par l’industrie de la captivité :
John Hargrove, soigneur spécialisé durant 14 ans, ancien responsable des orques du Marineland d’Antibes, apporte ici tout son soutien et son expérience de la souffrance vécue par les cétacés en captivité. Le témoignage adressé à One Voice par ce spécialiste américain, rappelle tout l’intérêt de l’actuel cadre réglementaire : « Il n’y a aucune raison d’ordre écologique ou de conservation de l’espèce à élever des dauphins en captivité et aucun de ceux qui l’ont été à Marineland n’a été relâché afin de repeupler les océans. Cela souligne clairement les motivations commerciales de l’exploitation animant Marineland, à l’heure où le parc tente de se soustraire par tous les moyens à cette nouvelle réglementation, qui signifie à terme la fin des cruelles souffrances endurées par ces animaux captifs. Merci à tous ceux qui en France se sont battus pour une telle législation. Vous êtes maintenant les fers de lance d’un combat repris dans d’autres pays, y compris aux États-Unis. »
Enfin, le
Dr. Pierre Gallego, vétérinaire-consultant, apporte quant à lui son point de vue médical sur le dossier : « Les dauphins sont des animaux extrêmement intelligents qui ont une vie sociale très complexe et des techniques de chasse extrêmement élaborées. Tous ces comportements ne peuvent pas être effectués en captivité. De plus les bassins sont totalement nus, il n’y a ni sable, ni rochers, ni algues, ni poissons, et l’eau est chlorée. Sans parler de la profondeur des bassins qui est au grand maximum de 5-7 mètres, ce qui ne leur donne aucune possibilité d’avoir un comportement naturel. De plus, les groupes en captivité sont formés par les managers des parcs, ce qui crée des groupes synthétiques, alors que dans la nature les groupes se font et se défont selon la structure sociale des Tursiops décrite comme fusion/fission. Ces groupes synthétiques sont figés et les individus n’ont aucune possibilité de s’éviter en cas d’agression, ce qui est assez fréquent chez les dauphins. Il en résulte un stress énorme qui peut mener à des ulcères gastriques et autres problèmes de bien-être, sans parler des blessures que les dauphins s’infligent, alors que dans la nature ils pourraient s’éviter. »
Pour toutes ces raisons, One Voice, représentant en France de la coalition Dolphinaria-Free Europe, appelle les autorités politiques et judiciaires à ne pas remettre en question les derniers textes encadrant cette activité commerciale. Rappelant que la reproduction contrôlée dans les bassins, par des moyens contraceptifs ou la gestion des groupes, devrait uniquement servir l’expression d’une sexualité naturelle parmi les détenus, non à perpétuer l’exploitation de générations de captifs dans une logique comptable totalement déshumanisée.
L’arrêté ministériel du 7 mai 2017 a donné aux dauphins et orques actuellement captifs de véritables espoirs : celui de voir leurs conditions de vie substantiellement améliorées et surtout celui d’être les derniers de leurs espèces à vivre en France une détention insupportable. L’éthique, le bons sens et l’humanité doivent ici continuer à prévaloir sur la logique commerciale.
Présidente de One Voice,
Muriel Arnal déclare : « On peut s’étonner du soudain caractère d’urgence invoqué par l’industrie et du moment choisi pour intenter ces recours… en plein été. L’arrêté ministériel du 7 mai dernier fait primer la dignité d’êtres sensibles dotés de cultures et de langages, sur les intérêts économiques. Il doit absolument être maintenu. En mettant un terme aux déchirements familiaux et aux deuils liés aux programmes de reproduction, ce texte va améliorer les conditions de vie des dauphins et des orques. Et ceux-ci seront les derniers détenus en France ainsi privés de liberté et de leurs droits fondamentaux. L’éthique, le bon sens et l’humanité doivent ici continuer à prévaloir sur la logique commerciale. »