Avec la chasse en enclos, on est sûr de remporter de gros lots !
Dans les enclos cynégétiques et les parcs clôturés, les animaux sont pris au piège. Les chasseurs les abattent sans difficulté, pour le seul plaisir de tuer.
Il y a la chasse, ses millions de victimes, ses campagnes ravagées… Et il y a pire : la chasse en enclos. Dans ces lieux grillagés, les animaux ne peuvent pas fuir. Il ne faut que quelques heures et encore moins d’efforts à leurs tueurs pour faire un « carton ». Les amateurs de trophées vite gagnés sont 100 % satisfaits.
Connaissez-vous la chasse en enclos ? Nos enquêteurs ont pu en infiltrer les coulisses. Ce loisir très particulier consiste à abattre en série toutes sortes d’animaux n’ayant aucune possibilité de s’échapper. Pour l’occasion, les amoureux de la gâchette se réunissent sur des terrains privés avec habitation, cloisonnés de toutes parts, et mitraillent en chœur la faune prise au piège.
Bain de sang assuré
Sur ces propriétés, tout est conçu pour garantir aux chasseurs un maximum de « trophées ». Concentrées sur quelques hectares, leurs proies n’ont d’autre alternative que de tenter vainement de fuir et de pousser leur dernier râle, acculées contre un mur ou un grillage de plus de deux mètres. L’ASPAS a été la première association à dénoncer ce système. Parmi les principales victimes, les « gibiers à poils », selon les termes utilisés par l’ONCFS, autrement dit incapables de voler : lapins, lièvres, biches, cerfs, daims, mouflons, entre autres… Et bien sûr… les sangliers ! Vous savez, ces ennemis publics numéro un qui, paraît-il, détruisent les cultures… Pour les adeptes de la chasse en enclos, il n’y en a jamais assez. Ils sont même prêts à dépenser des sommes astronomiques pour éprouver la joie de les massacrer par tous les moyens qui soient : fusil, épieu, meute de chiens affamés…
Maître en sa demeure
Ainsi, tout heureux propriétaire d’un domicile avec terrain attenant et hermétiquement fermé, peut, s’il est muni d’un permis de chasse et d’une assurance obligatoire, tirer sur tout ce qui bouge à l’intérieur. Chez lui, pas de quotas, pas de plan ni de saison de chasse à respecter pour les animaux à poils, pas de limitation de l’agrainage… Il fait ce qu’il veut et il est en règle ! Car, selon la loi, les mammifères présents sur un enclos sont considérés « res propria »… Traduire : « choses appartenant à une personne ». Et si cette personne veut leur faire la peau, grand bien lui fasse ! Elle peut même inviter autant d’amis qu’elle le souhaite pour le carnage, dès lors qu’ils sont eux aussi détenteurs de permis valables. Une fois la faune décimée, aucun problème : les élevages sont là pour remplir la « jauge ». Un simple arrêté préfectoral, ici par exemple, suffit pour obtenir des lâchers de cervidés, lapins, faisans, canards et autres perdrix élevés en captivité qui serviront de prochaines cibles.
Des enclos aux parcs de chasse avec clôtures, il n’y a qu’un pas…
Évidemment, on pourrait se rassurer en songeant que ce type de pratiques reste anecdotique. N’est pas châtelain ou détenteur d’une maison avec domaine naturel attenant qui veut… Mais la loi a tout prévu pour les « pauvres » chasseurs « seulement » détenteurs d’un bout de terrain. Ils peuvent, s’ils le clôturent aussi en bonne et due forme, le transformer en « parc de chasse ». Pour eux, aucun régime dérogatoire n’existe et ils sont soumis, comme les EPCC (voir encadré), aux dates d’ouverture et de fermeture réglementées. Théoriquement… Car comment contrôler ce qui se passe vraiment derrière des enceintes si protégées ? Et tellement infranchissables que même un homme ne peut passer ? De l’avis de Jean-Noël Rieffel, directeur régional de l’OFB Centre-Val de Loire, cité par La Montagne : « Le droit d’accès des inspecteurs de l’OFB aux enclos cynégétiques reste limité. » Un répertoire très intéressant donne une petite idée du nombre, non exhaustif, d’enclos et de parcs de chasse en France en fournissant les coordonnées de près de 150 d’entre eux. Et combien de cadavres pour finir ?… Signez notre pétition !
La mort, ça peut rapporter gros
Nombreux sont ceux qui ont reniflé le filon juteux et exploitent professionnellement les enclos cynégétiques. Ceux-ci prennent, dans ce cas, le statut d’ « établissements à caractère commercial en terrain clos » (EPCC) et ne peuvent alors plus déroger aux périodes de chasse réglementaires. En revanche, ils ont le « privilège » de pouvoir procéder à des lâchers de sangliers, interdits dans les enclos de chasse non commerciaux, depuis la création de l’Office français de la biodiversité (OFB), modifiant les missions des fédérations de chasseurs et renforçant la police de l’environnement. Seule contrainte de ces structures : ne pas dépasser plus d’un ongulé par hectare, faute de quoi « l’enclos » n’en serait plus un, juridiquement parlant, et serait considéré comme un établissement d’élevage. Or, dans ces derniers, la chasse est prohibée car assimilée à un « acte de cruauté ». Ainsi, aux yeux de la loi, la notion de « cruauté » se mesure en chiffres : superficie du terrain, nombre d’animaux parqués dans la zone. Qu’importe les grillages, la faune sauvage séquestrée, l’hécatombe de victimes… Des « détails » sans doute.