le vendredi 27 septembre 2019 | 6

Oiseaux élevés pour la chasse, un scandale bien français

Oiseaux élevés pour la chasse, un scandale bien français

Mis à jour le 10 octobre 2019

Et dire que ce sont nos impôts, reversés aux fédérations de chasse, qui financent l’élevage de ces faisans et perdrix, uniquement destinés aux "chasseurs du dimanche". Un système inepte et cruel à tous les niveaux.

Hr blog

Des images désolantes

Les amoureux de la nature pourront vous parler de la majesté du faisan fourrageant dans les plaines, des joyeuses troupes de petits perdreaux filant derrière leur maman dans un champ en jachère. Rien de cette liberté dans les élevages d’oiseaux destinés à la chasse, où la logique est industrielle : insémination artificielle et chaînes de tri automatisées pour les poussins nés en incubateur, loin de leurs parents. Au prime âge, les oiseaux vivront dans le noir durant des semaines (l’obscurité limite les agressions dans les concentrations d’animaux grandissant au sol, jusqu’à 50 par m2). Au stade juvénile, il faudra appareiller leur bec de plastique contre les atteintes physiques dans ces élevages à haute promiscuité. Douleur de la perforation des cloisons nasales, gênes dans la déglutition, sont parfois mortelles.

Le bagne avant la mort

Après des semaines passées enfermés dans des bâtiments, les oiseaux sont remisés à l'extérieur. Nos images révèlent des batteries de cages et volières à perte de vue, où règne une forte odeur mêlant la putréfaction des animaux morts et les fèces des survivants. Les couples de perdrix sont en piteux état dans d’étroits boxes métalliques où ils suffoquent l’été, se mutilent entre eux ou en tentant, en permanence, de s’échapper. Les plumages, chamarrés dans la nature, sont ici ternes, dégarnis à force de picages entre détenus. Ces bagnards arborent la tristesse de leur destin.

La présence humaine est ténue, les oiseaux sont livrés à eux-mêmes dans un univers sans enrichissement, au nourrissage automatisé et chimique. L’herbe a disparu depuis longtemps sous les incessants allers-retours des faisans rendus fous par la captivité. La terre est nue, ceinte de grillages doublés de filets de protection. Se jeter contre le grillage ne sert à rien, mais c’est leur principale activité. Le pire concerne les mâles reproducteurs, qui ne quitteront leur clapier ou volière qu’après deux ou trois ans de service, premier et dernier envol…



Souffrance animale, business cruel

Depuis la fin des années 1950, on élève en France des animaux uniquement destinés à la chasse. Espèces parmi les plus tuées en France, faisans et perdrix en sont les principales victimes. 19 millions par an, relâchés sans besoin d’autorisation et guère de contrôles. 

Or ces oiseaux, dont on travaille le profil génétique pour les rendre patauds et faciles à tuer, et qui seront relâchés après au moins 15 semaines d’élevage industriel, sont incapables de survivre dans la nature ! Face aux prédateurs, aux voitures, aux difficultés pour s’alimenter, aux maladies et bien sûr aux fusils qui les guettent, leur espérance de vie est très limitée. Alors, pour étoffer les tableaux de chasse, on perpétue, chaque année, cet immense et cruel gâchis.

Tout ce business va à l’encontre des besoins biologiques de ces oiseaux territoriaux, faits pour vivre sur de vastes espaces. Ici, privés d’interactions sociales pour apprendre une vie « normale », endurant, l’œil affolé, cette longue et terrible chaîne de « maturation », ils finiront violemment attrapés, entassés dans des caisses de transport livrées aux sociétés de chasse, pour y rester (au propre ou au figuré) de longues heures jusqu’au lâcher vers la mort. Que peut justifier cette souffrance organisée à la chaîne pour des millions d’oiseaux sensibles ? Le frisson de quelques nemrods ?

Un scandale bien de chez nous, qui n’honore ni les chasseurs ni les autorités qui regardent ailleurs…
#LaChasseUnProblèmeMortel : signez notre pétition, venez dire non lors de la grande manifestation unitaire pour une réforme radicale de la chasse, organisée par One Voice à Paris, le 5 octobre.


Sources : Office national de la chasse et de la faune sauvage, Syndicat national des producteurs de gibier de chasse (SNPGC), Enquête ASPAS, « De la cage au carnage », novembre 2018.

Frédéric Rideau
Hr blog

Dans la thématique

La période complémentaire de vénerie sous terre annulée dans cinq nouveaux départements ! Clap de fin pour les chasses traditionnelles ? Audience le 4 avril au Conseil d’État !

Commentaires 6

En déposant un commentaire j'accepte la charte de modération des commentaires.

Laura | jeudi 03 octobre 2019

Tous ceux qui habitent à la campagne ont croisé ces faisans ou perdreaux complètement perdus ,se rapprochant des habitations pour chercher à manger.
On lâche les animaux le dimanche matin pour que les chasseurs aient quelque chose à tirer ! La chasse actuelle est en très grande majorité un business puisque les chasseurs paient une cotisation à la société de chasse qui elle-même achète du gibier pour le relâcher afin que les chasseurs puissent "s'amuser". Bien loin du grand discours de régulation et de 1ers écolos de France. D’ailleurs, après la saison de chasse, il n’y a plus personne: bien loin aussi des discours de sauvegarde et préservation de la nature !

chris | jeudi 03 octobre 2019

Cela ne peut être considéré comme de la chasse, puisqu'il s'agit d'un animal sauvage élevé par les humains. Cette pratique devrait être interdite et condamnée pénalement.